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Photo du rédacteuragnès FAVARD

La relation d'emprise

Dernière mise à jour : 17 févr.



Les mécanismes à l’œuvre dans une relation d’emprise altèrent les capacités de réflexion de la personne qui en est victime. Ils la transforment petit à petit en objet dénué de toute aptitude à réagir.


Comment s’en extraire et se reconstruire ?


Qu’elle soit générée par une anxiété chronique générant un besoin de contrôle, ou par une structure psychique de type pervers (narcissique ou pas), la relation d’emprise vise a anéantir le désir propre de l’autre, en tant que sujet.


Les mécanismes en jeu dans ce type de relation, en déniant à l’autre son statut de sujet, amènent progressivement à une dégradation du lien. L’autre n’est plus perçu en tant qu’un égal avec ses propres désirs, mais est ramené au rang d’objet . Son identité et sa souffrance sont massivement niées. Le lien à l’autre ne peut plus s’inscrire dans une relation d’égal à égal. La victime se voit progressivement dépossédée de son libre arbitre.


Le changement s’effectue de manière suffisamment lente pour que l’évolution échappe concrètement à la conscience, d’autant que la victime va rapidement développer une adaptation au changement la privant de toute capacité à réagir. C’est l’histoire de la grenouille dans la marmite: "une grenouille nage dans une marmite d’eau froide. Un feu très doux est allumé sous la marmite, et la température augmente très doucement. L’eau est à présent tiède, et la grenouille ne s’aperçoit de rien, commence à ralentir son rythme, somnole, la température continue à monter, devient chaude, mais la grenouille engourdie ne parvient pas à réagir. La température continue de monter… la grenouille cuit!" C’est ce caractère insidieux qui empêche la victime d’identifier à temps la violence subie et de s’en protéger. D’autre part, le contrôle permanent, l’agressivité indirecte de l’auteur et les aller retour entre des attitudes tour à tour valorisantes puis dégradantes bloquent toute possibilité d’interprétation des signaux d’alerte véhiculés par l’angoisse.


Au plus l’agresseur va être confronté à sa propre violence, à ses actes et défaillances qu’il est en incapacité d’assumer d’un point de vue psychique, au plus il va en faire porter le poids à l’autre. Paradoxalement Il va alors se considérer comme victime, voir l’autre comme l’agresseur, et le rendre responsable de la situation.



Prendre le pouvoir pour se réassurer


Derrière la question de l’emprise se cache de part et d’autre celle de la carence affective précoce et du sentiment d’insécurité qui en découle. En général, le. manipulateur cache un vide intérieur et un manque de confiance en lui qu’il compense en faisant souffrir et en prenant le pouvoir sur sa victime. Ses émotions négatives sont utilisées comme un moteur de sa manipulation et de son emprise psychologique sur l’autre à travers lequel il règle des comptes avec sa propre histoire.


Ce n’est qu’en prenant un pouvoir qui lui donne le sentiment de garder le contrôle de la situation qu’il parvient momentanément à se rassurer, à calmer ses propres angoisses. Et momentanément car cette stratégie de courte durée s’écroule à chaque opposition ou tentative d’affirmation de soi de l’agressé.


Il en découle alors un sentiment de rejet, de persécution qui réactive alors un comportement de haine et de victimisation d’un agresseur incapable de se remettre en question.



Surtout ne pas relâcher la pression


Garder l’autre sous son contrôle nécessite de ne jamais lui laisser de marge de manœuvre, car cela pourrait avoir pour effet de lui permettre de prendre du recul sur la situation.

Le risque pour l’agresseur serait alors que la victime retrouve des capacités à agir pour se défaire de l’emprise. Il va alors user de divers stratagèmes oppressifs pour garder le contact en permanence afin de maintenir bien serrées les mâchoires du piège. Au plus l’autre est coincé, au moins il parvient à réagir, au plus l'agresseur est rassuré.


Cette toute-puissance permet de nier l’existence de l’autre, de le maintenir dans une position de dépendance qui n’est que le reflet de la propre dépendance à l’autre de l’agresseur, ce qu’il ne veut pas voir. Contrôler l’autre permet de ne pas le perdre tout en le maintenant à distance.


En étant mis à la place d’objet, la victime n’est utile que pour se masquer, se déresponsabiliser, ou se faire valoir (en se revalorisant à ses dépends par exemple). Sous entendus, attaque, dénigrements, paradoxes et contradictions sont autant de mécanismes qui fragilisent la victime et mettent à mal son intégrité psychique, en la faisant douter.


Le paradoxe peut alors devenir le suivant : plus la victime tente de comprendre, de remettre du sens, plus elle risque de s’engluer dans une dépendance largement induite par une absence de communication. Au fur et à mesure que l'agresseur se déresponsabilise, la victime se sur responsabilise. Dans ce fonctionnement, toute réaction légitime de sa part (telle que l’expression d’une colère ayant pour but de se défendre de l’agression par exemple), est susceptible d’être vécue à son tour comme une agression et, de ce fait, être pointée et de se retourner injustement contre la victime.


Il faut savoir que l’emprise psychologique peut être exercée par toute personne, à n’importe quel moment ou âge de la vie, de façon consciente ou inconsciente. Cependant, dans certains cas, cette tendance à la manipulation et associée à certains troubles mentaux comme les troubles de la personnalité (sociopathie, psychopathie, narcissisme) ou la perversion quelle qu’elle soit, y compris la perversion narcissique.



Le cheminement vers soi pour sortir de l'emprise


Il va s’agir, pour la victime d’une relation d’emprise, de se reconstruire en tant qu’individu à part entière, de se réapproprier son existence. Il va falloir parvenir à nouveau à identifier ses besoins, ses désirs, ses limites. Ce processus peut être long et douloureux, et induire un état de détresse psychique lié aux conséquences traumatiques des mécanismes en jeu dans la relation d’emprise (la dégradation de l’estime soi, la culpabilité d’avoir accepté cette situation, de ne pas avoir été en capacité de réagir). Il est donc primordial d’être soutenu.e et accompagné.e par un professionnel.


Dans ce cheminement, c’est aussi la prise de conscience d’avoir été manipulé et l’identification des mécanismes en jeu dans la relation d’emprise qui s’actualise, dans un mouvement d’aller-retour entre ce qui est de sa propre responsabilité et ce qui appartient à l’autre. Se défaire de tout ce qui a pu générer de la confusion va lui permettre de redéfinir ses propres limites et de comprendre qu’il n’en est pas responsable.


En conclusion


Au delà de la gestion du traumatisme lié à la relation d’emprise, la prise en charge thérapeutique va permettre de travailler plus globalement sur la racine, les mécanismes antérieurs qui ont ouvert la porte à la mise en place de cette relation d’emprise.


L’emprise est une forme de domination exercée par une personne sur une autre qui a mainmise sur son esprit et/ou sa volonté. C’est une forme de domination morale et/ou intellectuelle, dans laquelle la victime ne se rend pas compte sur ce qu’il se joue pour elle. L’emprise psychologique consiste à utiliser la manipulation mentale pour parvenir à ses fins. Elle n’est pas seulement réservée aux pervers.e.s narcissiques, mais peut concerner de nombreuses situations du quotidien, à n’importe quel moment de la vie. Identifier le plus tôt possible le processus d’emprise permet de s’en libérer et d’éviter de graves conséquences psychologiques.

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